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Le blog de Philippe MARGA

24 septembre 2012

Bienvenue !

Depuis plus de 20 ans, j'interviens dans le champ de la formation continue et du perfectionnement pédagogique auprès d'équipes de formateurs en Ecoles de la Santé. Ce blog me permet de rester en contact avec vous, d'échanger nos analyses et nos reflexions...
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30 septembre 2013

Communications diverses

Le 12/02/2013 : Conférence "Méthodologies de recherche et développement de compétences" CHU de Rennes, Comité d'Entente de la Région Bretagne des Instituts de Formation en Soins Infirmiers et Cadres de Santé

Le 8/01/2013 : Conférence "L'évaluation des compétences" IRTS de Nantes-Rezé

Le 14/06/2012 : Conférence "L'évaluation de compétences lors des stages cliniques" CHU de Bordeaux, Comité d'Entente de la Région Aquitaine des Instituts de Formation en Soins Infirmiers et Cadres de Santé

21 mars 2011

Compétences et évaluation

Cet article a été publié dans le supplément n°68 de la revue Soins Cadres. Décembre 2008.

 

 

La mise en place de nouveaux programmes de formation s’inscrivant dans une « logique compétences » va conduire les équipes pédagogiques et les équipes de professionnels accueillant les étudiants lors des stages à mettre en question leurs pratiques et leurs outils d’évaluation actuels.

Aujourd’hui encore essentiellement inscrites dans un modèle de type comportementaliste, privilégiant le contrôle de la performance, ces pratiques d’évaluation vont devoir vivre une véritable mutation, davantage culturelle que méthodologique.

 

La structuration progressive des programmes de formation aux métiers de la Santé autour d’une « logique compétences » interroge les praticiens de l’évaluation, qu’ils soient formateurs en Institut ou professionnels de Santé chargés de l’encadrement des étudiants lors de leurs stages.

Cette interrogation concerne l’objet de l’évaluation, la place de l’évalué dans l’évaluation, et la nature des procédés mis en œuvre pour évaluer, dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler  la « logique compétences ».

Cette question est d’importance, puisque qu’on remarque que les dispositifs d’évaluation influencent fortement la dynamique de formation des apprenants.

 

Il semblerait en effet que leurs efforts et les choix qu’ils effectuent dans leurs investissements, ou même l’importance qu’ils accordent à tel ou tel élément constitutif de leur formation, sont clairement influencés par la nature et la forme du système d’évaluation.

 

Il serait donc vain de vouloir introduire de nouvelles approches pédagogiques (apprentissage par situations, importance de la conceptualisation et du transfert des apprentissages) en maintenant des pratiques d’évaluation devenues obsolètes : il y aurait là le risque que l’évaluation vienne contredire les intentions pédagogiques énoncées dans le « projet compétences »

 

Une conception behavioriste de l’évaluation

 

Les pratiques actuelles de la majorité des acteurs chargés d’évaluation dans les filières des métiers de la Santé se situent à la conjonction de trois postulats.

 

Le premier de ces postulats, directement issu des approches behavioristes, définit le comportement comme seul objet de l’évaluation.

 

En lien direct avec la taxonomie de Bloom, qui influence fortement la culture pédagogique de ce milieu professionnel, cette centration sur le comportement conduit à assimiler l’évaluation à un système de mesure de la performance de l’évalué, fondé sur des indicateurs comportementaux.

 

Le second postulat renvoie à une distinction radicale entre évaluation normative et évaluation formative, telle que Scriven l’a proposée en 1967. Cette distinction amène à considérer que ces deux versants de l’évaluation, bien que complémentaires, sont incompatibles lors d’une même évaluation. L’évaluation normative consiste alors en l’énoncé d’une valeur attribuée à une réalisation prédéfinie. Cette valeur est énoncée par l’évaluateur ou le jury. L’analyse des caractéristiques singulières de cette réalisation relève d’un autre temps, dit d’évaluation formative, clairement distinct du premier.

 

Le dernier de ces trois postulats affirme la nécessité de distinguer le temps de formation et d’apprentissage, du temps d’évaluation de l’apprentissage. On retrouve là l’idée « d’évaluer les acquis », à travers la réalisation par l’évalué d’une activité spécifique, définie par le formateur, en fonction de ses « objectifs pédagogiques ». De ce point de vue, il apparaît naturel de procéder à cette évaluation des acquis à l’issue des séquences de formation à proprement parler.

 

Malgré de nombreuses initiatives visant à impulser d’autres approches de l’évaluation, on relève donc une référence majoritaire des acteurs à une approche privilégiant la mesure de la performance de l’évalué, et à une conception de l’évaluation que l’on pourrait qualifier de « verdictive ».

Le vocabulaire utilisé paraît particulièrement signifiant : les termes « jury », « épreuve d’évaluation », « délibérations », « restitution à l’évalué », « sanction » viennent jalonner le discours des acteurs de l’évaluation. Celle ci apparaît alors clairement dans sa finalité : renforcer positivement ou négativement le comportement de l’évalué, dans une démarche manifestement comportementaliste.

 

Un modèle coopératif de l’évaluation

Des différentes approches de la notion de compétence qui ont été développées depuis une quinzaine d’années (Le Boterf, Vergniaud, Perrenoud), on peut retenir deux éléments essentiels :

 

1.  la notion de compétence, en particulier lorsqu’elle s’applique au champ professionnel, implique que le sujet la mettant en œuvre dispose d’une part plus ou moins importante d’autonomie décisionnelle.

Est considéré comme compétent celui qui définit sa conduite de manière pertinente dans des situations professionnelles considérées comme significatives. Etre compétent implique donc de savoir rendre compte de ses processus de prises de décisions.

 

2. la compétence se définit en tant que combinatoire individuelle de ressources de nature différente (représentations, savoirs, savoir-faire…).

En rendre compte implique de considérer l’ensemble de ses composantes et de ses interactions. Ainsi par exemple, les articulations et interactions entre savoirs et savoir-faire auront peut être davantage d’importance dans la construction et la mise en œuvre de la compétence, que la seule acquisition de ces mêmes savoirs et savoir-faire.

Dans cette perspective, évaluer ne consiste plus à mesurer la performance de l’apprenant à partir d’indicateurs comportementaux, mais à établir avec le sujet évalué l’état de ses connaissances et de ses compétences.

Ni normative, ni formative, l’évaluation devient alors essentiellement formatrice.

Cette approche requiert la participation de l’apprenant à son évaluation. Qui mieux que lui peut commenter, étayer, expliquer sa manière d’appréhender une situation ou de résoudre un problème ?

Cette phase indispensable d’explicitation par l’apprenant confère alors à l’évaluation une dimension coopérative, qui établit un lien entre l’évalué et l’évaluateur fondamentalement différent de celui qui caractérise l’approche comportementaliste.

Dans ce processus, l’auto évaluation prend toute sa place : en même temps que le sujet apprend des situations d’évaluation, il intègre et s’approprie le référent d’évaluation. Loin de « se soumettre à une épreuve de contrôle », il apprend à évaluer.

 

Enfin, inscrire l’évaluation dans la « logique compétences » conduit à remettre en question la distinction faite habituellement entre le temps d’apprentissage et le temps d’évaluation de l’apprentissage.

En effet, dans une logique de développement des compétences, les méthodes pédagogiques mises en œuvre sont fortement chronophages : approches inductives par l’analyse de pratiques, l’apprentissage par situations problèmes, la pédagogie de projets.

Le temps pédagogique étant lui-même limité, il devient quasi impossible d’ajouter au temps de formation un temps spécifique consacré à l’évaluation. Comment par exemple, ajouter à la réalisation d’un projet dont la finalité est formatrice (apprendre en faisant), la réalisation d’un second dont la finalité serait cette fois ci évaluatrice ? (faire pour démontrer que l’on sait). S’il était classique dans une pédagogie magistrale de « faire le cours », puis d’organiser une séquence de « contrôle des connaissances », l’approche par compétences repositionne l’évaluation dans une fonction de jalonnement et d’accompagnement du parcours d’apprentissage.

 

Points essentiels

 

Approche behavioriste de l’évaluation

 

Modèle coopératif d’évaluation des compétences

  • L’évaluation constitue un moyen de contrôler l’atteinte des objectifs d’apprentissage par l’apprenant
  • L’évaluation consiste à établir avec l’apprenant l’état de ses connaissances et de ses compétences
  • L’évaluation contrôle le degré d’acquisition
  • L’évaluation prépare les apprentissages ultérieurs
  • Evaluation normative et évaluation formative sont distinctes
  • L’évaluation est formatrice
  • L’observation du comportement de l’évalué permet de mesurer le degré d’atteinte du niveau de performance
  • L’explicitation par l’apprenant de ses processus décisionnels et opérationnels constitue le cœur de l’évaluation 
  • Les temps d’apprentissage et d’évaluation sont différenciés 
  • L’évaluation accompagne l’apprentissage 

 

L’approche coopérative de l’évaluation des compétences éclaire d’un jour nouveau la question de la posture du formateur dans l’évaluation.

Dans le modèle traditionnel de l’évaluation contrôle, et dans l’approche behavioriste, la posture du formateur est référée à une représentation très particulière de la fonction de l’évaluation.

Cette représentation correspond à ce que l’on a parfois nommé « le modèle de la dette » : les enseignements étant « donnés » par les enseignants, ils sont « dus » (en quelque sorte « remboursables »).

Evaluer consiste alors à contrôler la qualité de la restitution ( le « remboursement ») par l’apprenant des savoirs et savoir-faire qui lui ont été enseignés.

Dans cette option, la posture de l’évaluateur consiste en une posture de contrôle, de vérification, de mesure de la conformité / non-conformité.

Elle suppose l’existence de ce que Lacan a nommé le « sujet supposé savoir » : au-dessus des procédures, des épreuves et des outils d’évaluation, le « sujet supposé savoir », c’est à dire l’évaluateur, dit et indique le vrai et le faux.

La reconnaissance de la validité de ce jugement repose sur la confiance que l’évalué a dans le système, ce qui revient à dire que cette confiance repose sur un transfert positif de l’évalué envers l’évaluateur.

Une différence d’appréciation peut de ce fait être appréhendée en tant que contestation de la parole du « sujet supposé savoir », dont la nature est alors quasi subversive.

On comprend ici pourquoi l’introduction de l’auto évaluation dans l’évaluation comportementale des performances génère immanquablement incompréhension, réticence, résistance.

 

Dans une approche coopérative de l’évaluation des compétences, la posture du formateur est toute autre.

Elle s’inscrit dans un type de relation certes complémentaire, mais qui inclut la réciprocité : l’évalué livre son explicitation et son analyse, et, en ce sens, nourrit la réflexion de l’évaluateur, qui, à son tour, livre un feedback à l’évalué.

Evaluateur et évalué coopèrent dans une démarche de compréhension réciproque et partagée (pour l’un, comprendre et apprendre comment l’apprenant prend ses décisions en situation, pour l’autre comprendre et apprendre de la situation).

Ce changement concerne alors non seulement la posture de l’évaluateur, mais aussi celle de l’évalué : écoute, échange, partage, réciprocité

 

Quelques exemples d’évaluation coopérative des compétences

 

 

  • Analyse interactive du processus de prise de décision en situation professionnelle propre à l’apprenant 
  • Bilans réguliers et interactifs au cours de l’apprentissage d’une méthodologie à usage professionnel  
  • Bilans en équipe d’apprenants et de formateurs d’une session d’analyse de pratiques  
  • Suivi et bilan partagé de l’élaboration et la conduite par l’apprenant (ou le groupe d’apprenants) d’un projet ou mini projet professionnellement significatif
  • Lors d’un stage, identification par l’apprenant d’une activité significative de la mise en œuvre d’une compétence particulière, gestion de l’activité et de la situation, argumentation, auto évaluation, feedback du formateur

 

L’émergence progressive de ce modèle coopératif d’évaluation, qui apparaît pour l’instant de manière éparse dans les pratiques de formation développées dans les filières de formation aux métiers de la Santé, indique davantage une voie à suivre qu’elle ne propose une démarche et une méthodologie d’évaluation « clefs en mains ».

Elle conduit cependant à modifier certaines représentations, profondément inscrites dans la culture et dans l’imaginaire des évaluateurs.

En ce sens, l’introduction de la « logique compétences » dans les dispositifs de formation aux métiers de la Santé pourrait induire un changement de culture pédagogique, changement bien plus profond que celui lié aux seules modifications d’ordre méthodologique inhérentes à la mise en place d’un nouveau programme d’études.

 

3 février 2011

Bibliographie relative à l'évaluation de compétences

Cette bibliographie que je propose, en réponse aux nombreuses demandes de Formateurs et d'étudiants en IFCS, me semble constituerun tour d'horizon interessant des problématiques de l'évaluation.

 
 

  • « L’évaluation formative dans un enseignement différencié »

Linda Allal, Jean Cardinet et Philippe Perrenoud– Editions Peter Lang 1985

 

  • « D’une évaluation en miette à une évaluation en actes »

J. Ardoino, G. Berger – Editions Andsha 1989

 

  • «  L’erreur, un outil pour enseigner »

JP Astolfi – ESF 1997

 

  • « Les savoirs d’action : une mise en mot des compétences ? »

Jean Marie Barbier et Olga Galatanu – L’Harmattan 2004

 

  • Le guide des techniques d’évaluation : performances, compétences, connaissances

Claude Billet – Dunod 2008

 

  • « Evaluation – régulation et appropriation des compétences »

J.J. Bonniol – Actes de l’Université 1994

 

  • « Les modèles de l’évaluation »

J.J. Bonniol et A. Vial– De Boeck 1997

 

  • «  L’ingénierie des compétences »

G. Le Boterf – Editions d’organisation 1998

 

  • « Construire les compétences individuelles et collectives »

G. Le Boterf – Editions d’organisation 1998

 

  • «  Repenser la compétence : pour dépasser les idées reçues»

G. Le Boterf – Editions Eyrolles 2008

 

  • «  Evaluer des compétences : guide pratique »

François-Marie Gérard – De Boeck 2008

 

  • « Motivation, projet personnel, apprentissage »

M. Croizier – ESF 1995

 

  • « L’évaluation, règles du jeu »

Charles. Hadji – ESF Paris 1993

 

  • « L’évaluation démystifiée »

Charles Hadji– ESF Paris 1997

 

  • « La fabrication de l’excellence scolaire : du curriculum aux pratiques d’évaluation »

Philippe Perrenoud – Droz 1995

 

  • « L’évaluation des élèves »

Philippe Perrenoud – De Boeck 1998

 

  • « Faire réussir, faire échouer »

V. de Landsheere – PUF 1988

 

12 juillet 2010

L'évaluation des compétences lors de stages

Cet article a été publié dans le supplément de la revue Soins Cadres n°74. Mai 2010

L’évaluation menée lors des stages, dans le cadre du nouveau référentiel de formation infirmière, prend à contre-pied certaines représentations qui animent l’imaginaire des professionnels de terrain ❚ Utiliser les outils et les supports de l’évaluation en stage, sans modifier sa manière de penser la compétence et la destination que l’on accorde à l’évaluation, conduit à des contradictions méthodologiques et risque de priver l’évaluation de stage de sa dimension la plus riche : sa dimension formatrice.

Skills assessment during practice placements. The assessment carried out during practice placements, in the context of the new nursing training reference framework,is sometimes at odds with the interpretation certain professionals in the fi eld have of skills assessment. Using the practice placement assessment tools and materials, without modifying the way of thinking about the concept of skill and the intended purpose of the assessment, leads to methodological contradictions and risks depriving the practice placement assessment of its most important dimension: its educational element.

La mise en place progressive de référentiels de formation structurés autour de la notion de compétence dans les différentes filières de formation des métiers de la santé confronte les professionnels qui y participent à la nécessité de développer des approches pédagogiques qui, si on ne peut les qualifier d’innovantes, leur sont au moins inhabituelles.

Ainsi, la mise en oeuvre du nouveau référentiel de formation infirmière et celle du dispositif d’évaluation de la construction des compétences des étudiants au cours des stages conduisent ces acteurs à voir remise en question leur représentation de l’évaluation – et des évaluations de stage en particulier – mais également leur représentation de la notion de compétence.

Cette notion fait pourtant l’objet de définitions désormais communément partagées : « Savoir agir en situation », « mise en oeuvre dans un contexte déterminé d’un ensemble de ressources diversifiées permettant un traitement réussi de situations ».

Mais la structuration d’un dispositif de formation et la mise en oeuvre d’une démarche pédagogique reposant sur une “entrée par les compétences” peuvent être interprétées selon diverses orientations conceptuelles et méthodologiques.

“COMPÉTENCE-CONTENANT” ET “COMPÉTENCE SITUÉE”

Nous évoquerons ici deux manières d’appréhender la notion de compétence du point de vue pédagogique

❚ Une de ces approches privilégie la fonction de structuration pédagogique de la compétence. Dans cette perspective, la compétence est considérée en tant que contenant qui permet d’organiser entre eux des savoirs en fonction de leur finalité. La compétence apparaît alors comme un savoir complexe, décontextualisé, décomposable en capacités, habiletés, connaissances.Dans ce cadre, la compétence permet d’organiser de manière hiérarchisée les contenus d’un programme d’études, tel un outil d’ingénierie pédagogique. On retrouve ici la démarche intellectuelle et méthodologique de la pédagogie par objectifs (PPO) et des approches behaviouristes de l’apprentissage.

Appréhender la compétence sous cet angle renvoie sans doute, dans l’imaginaire des formateurs et des professionnels chargés de l’encadrement des étudiants, à l’idée qu’elle constitue la finalité de l’apprentissage et non son objet. Il s’agit alors en quelque sorte de former les étudiants pour qu’ils puissent “à l’avenir” être compétents et non pas de les former à “être compétents”.

Bien évidemment, cette représentation posera un problème majeur lorsqu’il s’agira d’évaluer l’acquisition par l’étudiant de compétences au cours de son stage, puisque, dans cette perspective, l’acquisition de compétences n’est par définition possible qu’après la formation.

❚ Dans l’autre approche de la notion de compétence – dite “compétence située”–, c’est la logique situationnelle qui prévaut dans l’organisation de la formation et de l’évaluation. Cette option repose sur l’idée qu’une compétence s’exerce dans l’action en situation et par la réflexion sur l’action. La compétence se définit de ce fait comme une “intelligence des situations” et non comme un contenant de savoirs.

Cette approche de la notion de compétence relève d’une posture épistémologique socio-constructiviste.

INCIDENCES SUR L’ÉVALUATION AU COURS DES STAGES

L’évaluation réalisée au cours des stages sera bien évidemment déterminée par la représentation et l’usage que les professionnels feront de la notion de compétence. Que l’acquisition de compétences soit considérée comme l’objet ou comme la finalité de l’apprentissage, et toute la philosophie et la démarche d’évaluation en seront transformées.

D’un côté, évaluation-contrôle, centration sur des acquisitions (ressources de la compétence) hiérarchisées et programmées, tests de performances effectués dans le cadre de séquences expressément conçues pour l’évaluation. De l’autre, évaluation coopérative menée avec l’apprenant,au décours de ses apprentissages réalisés au sein de situations de travail telles qu’elles se présentent dans le terrain de stage.

On retrouve ici la confrontation des modèles d’évaluation de type behaviouriste et coopératif déjà présentée dans ces pages.

Ce conflit entre représentations, donc entre deux approches de l’évaluation, est sans doute pour une bonne part à l’origine de plusieurs difficultés rencontrées par les tuteurs et les membres des équipes de soins lors des évaluations des étudiants qu’ils encadrent.

ÉVALUATION DE LA CONSTRUCTION DE COMPÉTENCES LORS D’UN STAGE

Quatre repères essentiels permettent de clarifier l’évaluation des étudiants lors de leurs stages, dès lors que celle-ci s’inscrit clairement dans une approche de la compétence dite “compétence située”

❚ Le stage, en tant que séquence de formation, constitue une réponse structurée à la demande et aux besoins singuliers d’un étudiant, à un moment de son parcours d’apprentissage.Concrètement, cela signifie qu’un étudiant exprimant, à son arrivée en stage, le souhait de progresser dans telle ou telle compétence, se verra proposer de participer à la gestion de certaines situations professionnelles propres à ce terrain de stage. Ces situations constituant le contexte dans lequel les compétences se mettent en oeuvre seront tout autant les “supports” de l’apprentissage que de l’évaluation.

Cela revient à dire qu’évaluer là où en est un étudiant dans la construction d’une ou plusieurs compétences équivaut à évaluer sa gestion des situations de mise en oeuvre des compétences, ces  dernières étant propres à chaque terrain de stage.

❚ L’objet de l’évaluation lors des stages correspond à la définition même d’une compétence. Il va donc s’agir d’évaluer :

• la capacité de l’étudiant à “traiter avec compétence” les situations professionnelles considérées comme pertinentes, soit la pertinence de ses interventions et ses capacités adaptatives

• son intelligence situationnelle, soit ce qu’il comprend et explicite du contexte et de ses interventions

• sa capacité à “transférer” ses acquis dans différentes situations d’une même classe, soit sa capacité à reconstruire ou réinventer son intervention, et non à dupliquer un modèle de réponse préétabli.

Autrement dit, l’étudiant est évalué sur son “agir” dans des situations et activités significatives de l’une ou l’autre des dix compétences du référentiel, et non dans des activités spécialement mises en place pour procéder à l’évaluation. En revanche, il lui est demandé une explicitation pré et post-action, ainsi qu’une autoévaluation, qui ne sont pas d’ordinaire demandées à l’infirmier dans son exercice professionnel habituel.

❚ Cette évaluation est par nature coopérative. Elle est menée avec l’étudiant. Une large place est faite à l’explicitation qu’il peut réaliser de ses processus décisionnels et à l’autoévaluation de ses interventions.

❚ L’évaluation de compétences, jalonnant le parcours d’apprentissage de l’étudiant plutôt qu’elle ne le sanctionne, constitue finalement un feedback délivré à l’étudiant par l’ensemble des membres de l’équipe l’ayant accompagné, le tuteur étant positionné comme porte-parole de l’équipe.

ÉVALUATION DE LA CONSTRUCTION DE COMPÉTENCES DANS LE CADRE D’UN PROCESSUS DE FORMATION EN ALTERNANCE

L’évaluation de la construction des compétences de l’étudiant lors d’un stage ne constitue qu’une phase particulière de l’évaluation des compétences.

Un des mérites du livret faisant office de portfolio dans le nouveau référentiel de formation infirmière est de souligner l’aspect ponctuel et relatif de cette évaluation, en faisant apparaître non seulement la succession des évaluations de stage, mais aussi les travaux d’analyse de pratiques réalisés par les étudiants.

Au final, l’évaluation va associer et synthétiser trois facettes de la construction des compétences :

• l’évaluation des compétences lors d’un stage, telle qu’abordée précédemment (une compétence s’exerce dans l’action en situation) ;

• l’évaluation de l’habileté de l’étudiant à transférer des apprentissages d’un contexte de stage à un autre (quel serait l’intérêt du portfolio s’il ne permettait pas de prendre en compte cette habileté ?) ;

• les capacités réflexives de l’étudiant (une compétence s’exerce dans la réflexion sur l’action). Cette synthèse, réalisée dans le cadre d’un entretien réunissant l’étudiant et son formateur référent, permettra d’effectuer un “point de situation” quant au stade d’avancement de la construction de ses compétences et de préparer la suite de son parcours d’apprentissage..

CONCLUSION

La mise en place d’un dispositif pertinent d’évaluation de compétences lors des stages cliniques pose un double défi aux acteurs qui y participent :

• un changement de paradigme quant aux concepts mêmes de compétence et d’évaluation ;

• la mise en place d’un dispositif “en réseau” associant apprenant, professionnels et formateurs.

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